Est-ce que tout le monde peut faire soigner ses dents ?
Outre la peur, plus ou moins infondée, du dentiste, il est une autre crainte qui peut entraîner un renoncement aux soins : celle de la facture. Mais qu’en est-il réellement ? Un consensus peut-il être trouvé entre le patient et son praticien ? Les explications du Docteur Michel Abbou*, chirurgien-dentiste à Paris.
Est-ce que la réforme 100% santé dentaire a changé le rapport des patients aux soins bucco-dentaires ? Consultent-ils plus volontiers ?
Dans mon cabinet, je ne vois pas de changements particuliers. Et d’ailleurs, les confrères que je fréquente font le même constat. En revanche, cette réforme semble pousser certains patients qui n’allaient pas consulter, à se rendre dans des centres dentaires, mais avec comme corollaire de ne pas pouvoir choisir leur praticien… Rappelons aussi que ces centres dentaires ne sont pas sous le contrôle du Conseil de l’Ordre…
Outre la technicité qu’elle suppose, la dentisterie c’est un challenge physiologique, économique et relationnel… Avec une nécessaire forte dose d’empathie.
Il est vrai que les patients seront plus observants si une relation de confiance s’installe avec un praticien. Mais reste la question du coût… Comment proposer des soins conformes aux besoins des patients tout en tenant compte de leurs réalités sociales et économiques ?
C’est la question fondamentale ! Pour qu’une relation pérenne s’installe entre un patient et un chirurgien-dentiste, il faut une double motivation. Le praticien face aux besoins d’un patient, ainsi qu’à ses limites économiques, peut consentir à un effort plus ou moins important. Mais pour cela, il faut aussi que son patient soit prêt à s’impliquer dans son plan de traitement, à bien en comprendre les tenants et aboutissants pour bien le suivre, à s’obliger également à une bonne hygiène bucco-dentaire. En réalité, la vraie réussite, c’est quand nous arrivons à débuter un plan d’action thérapeutique… Et à le mener à son terme ! Outre la technicité qu’elle suppose, la dentisterie c’est un challenge physiologique, économique et relationnel… Avec une nécessaire forte dose d’empathie.
Reste que près de 17 % des Français renoncent à des soins dentaires pour des raisons financières…
Dans notre métier, il y a toujours plusieurs façons de prodiguer des soins. En fonction du temps passé, des matériaux choisis, de la technique retenue… il y aura toujours une alternative pour le patient. Le rôle du chirurgien-dentiste est donc de mettre en œuvre le plan de traitement approprié en fonction des besoins de son patient. Plus que le résultat thérapeutique, ce que je recherche, c’est le maintien de la relation de confiance avec mes patients, quitte à entreprendre des actions thérapeutiques à types de compromis. Par exemple, il est inutile d’imposer un rendez-vous long à une personne qui ne va pas le supporter, ou encore de proposer un plan de traitement au long cours à une personne impatiente qui sait qu’elle n’ira pas au bout de la démarche. Il importe de bien écouter et de bien informer, de s’inscrire dans une approche éclairée…
Comment justement gérer le consentement éclairé auprès des patients ?
Généralement, cela relève de l’expérience mais aussi de la bonne volonté ! Dans le pire des cas, même si je ne trouve pas de terrain d’entente avec mon patient, le fait de l’avoir informé sur son état de santé bucco-dentaire en lui donnant des éléments qu’il n’avait pas en arrivant à mon cabinet, est déjà une petite victoire. Dans le domaine de la santé, on ne devrait pas avoir à chercher un prix. C’est pourquoi, si le préalable est le « zéro reste à charge », il y a peu de chances d’aboutir à des résultats satisfaisants et fiables sur la durée. La motivation première doit être de se soigner le mieux possible et d’en être convaincu via les données et les discours professionnels…
Revenons, sur le zéro reste-à-charge voulu par la réforme, n’est-ce pas là un moyen de faire revenir les patients dans les cabinets dentaires ?
Encore une fois, tout va dépendre des actes et des matériaux. En dehors des « paniers » pris en charge, restent quand même des prestations médico-dentaires qui ne sont pas incluses car dites « hors nomenclature » alors même qu’il s’agit de soins importants qui ne sont ni rares, ni inutiles… Prenez la parodontologie, par exemple : cette spécialité concerne pratiquement toute la population adulte, et pourtant, elle n’est pas prise en charge… Mais l’on pourrait tout aussi bien parler de l’implantologie ou encore de l’occlusodontie qui ne sont pas plus remboursées…
En cas de litige ou de mauvais traitement, il est très complexe de se retourner contre la clinique située à l’étranger, en dehors de notre champ réglementaire et législatif.
Par peur du budget, certains patients vont parfois aller chercher des soins à l’étranger. Cela représente-t-il un risque ?
Il y a deux écoles avec d’un côté des patients satisfaits de leurs soins réalisés à l’étranger, mais de l’autre des patients qui reviennent au cabinet français parce que finalement, ils auront eu des problèmes à leur retour en France… Se pose aussi la question du suivi, comme d’ailleurs dans n’importe quel centre dentaire… En outre, en cas de litige ou de mauvais traitement, il est très complexe de se retourner contre la clinique située à l’étranger, en dehors de notre champ réglementaire et législatif.
*Le Dr Abbou n’étant ni représentant syndical, ni représentant ordinal, il tient à préciser que ses propos n’engagent que lui.
Bonjour, allez vous aborder le sujet de l’accès partiel qui ouvre l’exercice des Hygiénistes dentaires et des Denturologistes de l’UE en France .
Cordialement .