Les patients pauvres victimes de “stéréotypes” chez les praticiens
Les patients en situation de précarité, bénéficiant par exemple, de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C), sont victimes de “représentations médicales stéréotypées”, pouvant conduire à des prises en charge différenciées, voire à des discriminations, selon une étude publiée lundi par le Défenseur des droits.
Celle-ci repose sur des entretiens conduits entre 2015 et 2016 auprès de 50 médecins (spécialistes et généralistes) et chirurgiens-dentistes concernant la prise en charge de patients précaires, bénéficiaires de la CMU-C, de l’ACS (aide à la complémentaire santé) ou de l’aide médicale d’état (AME). Elle a été réalisée par le laboratoire LEPS de l’université Paris XIII, à la demande du Défenseur des droits et du Fonds CMU.
Ce que révèle l’étude
Premier constat : La catégorie des patients “CMUs” “est largement utilisée dans les discours des praticiens, devenant une autre manière de nommer les personnes” pauvres, souligne le Défenseur des droits dans un communiqué. “On dit les CMU comme on dit les obèses, les borgnes, les machins, ce qui n’est pas très joli non plus” résume ainsi une pédiatre citée dans le rapport. Au groupe des CMUs “se superposent” les préjugés associés à la pauvreté :”soupçons de fraude, mais aussi anticipation de difficultés de suivi” (surconsommation de soins, absentéisme, retards fréquents). “Cet étiquetage social favorise des pratiques professionnelles différentes, dont certaines renvoient à une discrimination”, notamment par un refus de soins, isolé ou systématique, notent les auteurs de l’étude. Mais les discriminations peuvent s’exprimer “de manière plus insidieuse“, avec par exemple “la réorientation systématique d’un patient vers un autre praticien ou à l’hôpital, des délais d’attente anormalement longs”, sans qu’elles soient considérées comme telles par les praticiens.
“On dit les CMU comme on dit les obèses, les borgnes, les machins, ce qui n’est pas très joli non plus”
Une différence de traitement lourde de conséquences
En outre, si “une grande majorité” exerce de “manière égalitaire”, d’autres s’ajustent, en partant par exemple du principe que les conditions de vie du patient rendront impossible le suivi d’un traitement, au risque de proposer „une offre médicale de moindre qualité”. Le Défenseur des droits, qui a ouvert plusieurs enquêtes en décembre concernant des médecins refusant des bénéficiaires de la CMUC ou de l’AME, préconise de réaliser un testing national, de préciser les types de refus de soins illégaux dans le code de la santé publique ou encore de demander à l’Assurance maladie “de recenser les praticiens” ne respectant pas les tarifs de la sécurité sociale pour les bénéficiaires de la CMUC ou de l’ACS. Il a également été saisi en janvier par des associations pour des refus de prise de rendez-vous sur un site internet.
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