Inégalités sociales : 15 000 cancers évitables ? Etude
Une étude publiée ce mardi dans le bulletin épidémiologique hebdomadaire de Santé publique France met en avant que près de 15 000 cas de cancer pourraient être évités chaque année en France par une amélioration des conditions de vie et de la santé des populations les plus défavorisées.
Un gain potentiel qui serait d’ailleurs plus important pour les hommes que pour les femmes et maximal pour le cancer du poumon, notent les auteurs. Il apparaît, en effet, que dans les populations défavorisées, certains cancers ont une plus forte incidence. Chez les hommes, on parle, notamment, des cancers du larynx, de l’oesophage, du pancréas et de la vessie. Chez les femmes, du cancer du col. A contrario, certains mélanomes, les cancers de la prostate, des testicules, des ovaires et du sein sont plus fréquents dans les zones aisées. Les inégalités sociales sont dès lors résolument en cause…
Confirmation d’un sur-risque pour les populations défavorisées…
L’analyse – la première du genre en France – met ainsi en avant l’influence de l’environnement socioéconomique sur le nombre de nouveaux cas annuels de la maladie, qui diffère selon les organes touchés. Pour ces travaux spécifiques, elle a porté sur près de 190 000 personnes, dont environ 80 000 femmes ayant eu un cancer entre 2006 et 2009 et habitant dans l’un des 16 départements disposant d’un registre des cancers. Les résultats qui en découlent confirment le sur-risque déjà connu des cancers des voies respiratoires et digestives hautes pour les populations des milieux défavorisés. « La détermination sociale de certains facteurs de risque comme la consommation de tabac, les expositions professionnelles ou les polluants atmosphériques explique sans doute une partie importante des différences observées », expliquent Joséphine Bryère, chercheuse à l’Inserm, et ses collègues.
… et découvertes, aussi
Ce que l’étude nous apprend et que nous ne savons pas en revanche, c’est aussi que d’autres cancers (foie, estomac, pancréas et vessie) pouvaient également être plus fréquents dans les populations défavorisées, indique le professeur Guy Launoy (Inserm-Caen et réseau national des registres des cancers-Francim), co-auteur de l’étude. Les chiffres dévoilés grâce aux travaux des experts parlent d’eux-mêmes : la part des cas de cancers attribuables à un environnement socioéconomique défavorisé était la plus importante pour les cancers du larynx (30%), des lèvres-bouche-pharynx (26,6%), du poumon (19,9%) et de l’oesophage (16,7%) chez les hommes. Chez les femmes, il s’agissait des cancers des lèvres-bouche-pharynx (22,7%), du col de l’utérus (21%) et de l’estomac (16,4%).
Le dépistage en cause
« La surreprésentation du cancer de la prostate dans les milieux les plus favorisés, et dans une moindre mesure pour le cancer du sein, est sans doute très liée aux pratiques de dépistage plus fréquentes dans ces sphères, et, pour la prostate, au sur-diagnostic très important constaté pour ce cancer qui évolue extrêmement lentement », précise le Pr. Launoy. Pour autant, pour le spécialiste, il n’est pas possible d’apporter une réponse satisfaisante à la fréquence plus élevée des cancers de l’ovaire, du testicule et surtout, à l’apparition d’un mélanome dans les milieux favorisés. Plus que jamais, la lutte contre les inégalités sociales de santé doit aussi passer par des politiques dédiées en matière d’éducation, d’urbanisation, de transports et d’emploi, rappellent les auteurs.
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